Au cirque, les animaux sont sans arrêt contraints à des mouvements contre-nature. Pour cela, une pression constante doit être maintenue sur eux. Qu’elle implique un fouet ou une pique, elle repose sur une forme de coercition afin d’obtenir l’obéissance. Le dressage est une violence, absolument incompatible avec le bien-être de l’animal.
Coercition et chantage
Le dressage des éléphants dure entre 2 et 3 ans, il s’agit donc de soumettre l’animal pour l’habituer à effectuer un certain nombre d’actions. Cette période d’apprentissage débute lorsque l’animal est sevré.
Le dressage se base sur la domination. Le dresseur s’impose en dominant du groupe et maintient la subordination de l’éléphant par le biais de la punition physique et psychologique.
Bucky Steel, propriétaire d’un ranch d’éléphants au Texas explique les différentes étapes du dressage d’un éléphant.
« Dressage en écurie »
Cette période « d’imprégnation » permet d’habituer l’animal à la circulation du public, aux éclairages, à la musique et à toutes les contraintes associées à ces démonstrations. Cette période de pré-dressage est tout à fait hypothétique dans les cirques français, les éléphants étant souvent dressés dans les quartiers d’hiver.
De la soumission à la coercition
B. Steel insiste sur la nécessité d’aider l’éléphant à surmonter son instinct de conservation primitif et lui apprendre à vous faire confiance et à se sentir à l’aise. Il reconnaît qu’au cours du dressage la plupart des éléphants deviennent nerveux et font des saletés…
Cette nervosité et cette peur seraient non seulement liées à la perte des repères inhérents à la nature même de l’animal (groupe social notamment), mais également aux méthodes utilisées pour plier l’éléphant au bon vouloir du dresseur.
L’enchaînement est pratiqué quotidiennement, l’éléphant ne sera alors abreuvé et nourri qu’une fois attaché. Cette méthode de coercition est couramment utilisée en France.
L’étape suivante consiste à apprendre à l’animal à lever le pied pour mettre la chaîne avant, puis à reculer pour mettre la chaîne arrière. Lui apprendre à reculer nécessite l’utilisation d’un « crochet »…
Le public émerveillé par les numéros de trapézistes et de clowns est loin de s’imaginer la violence qui se cache derrière le strass et les paillettes. Aussi, est-il nécessaire de camoufler au mieux cet instrument de torture. Il est donc d’usage de le recouvrir de petites lanières – lui donnant ainsi l’apparence d’une fleur…
Des numéros « contre-nature »
Se coucher
Apprendre à un éléphant à se coucher, c’est lui apprendre une position « contre-nature ». Cette position étant une mise à découvert de l’animal qui ne peut alors plus se défendre. Il est donc nécessaire d’utiliser des câbles ou des cordes pour imposer cette position à l’éléphant.
Le poirier
« Des tests ont montré que chez un mâle asiatique mesurant 2,90 mètre au garrot et pesant 4,2 tonnes, le poids est réparti sur la surface de contact avec le sol de telle sorte que chaque centimètre carré ne supporte qu’une pression de 600 g». Le poids conjugué de la nuque, de la tête, de la trompe et des défenses sur les membres antérieurs rend par conséquent très difficiles les descentes. Les éléphants se laissent donc glisser. La position du poirier est une posture très dommageable pour les articulations, tout le poids de l’animal étant concentré sur ses deux pieds avant.
Les Dr Helmut Pechlaner et Harald Schwammer considèrent que « Ces positions peuvent causer des blessures aux articulations et aux disques intervertébraux des éléphants adultes, ainsi que des fissures dans les ongles. Quant aux exercices d’équilibre, ils peuvent être à l’origine de dérangements moteurs dans les articulations du coude et du genou »
Cette posture étant étrangère et douloureuse pour l’animal, elle ne peut être obtenue que par la force. La douleur assénée par les coups de pique doit alors dépasser en intensité la douleur de la posture elle-même.
Marcher sur les « genoux »
Le dresseur Pedro Marceau impose une position qu’il qualifie lui-même de « très difficile pour les éléphants». Samba, chevauchée par une femme, tremble sur ses genoux, la position est douloureuse. Mais le dresseur, une pique à la main, ne lui laissera pas l’opportunité de présenter un refus.
Selon Martin Saller et Karl Gröning (1998), « le simple fait de s’agenouiller sur les deux pattes représente une forte contrainte pour les articulations et la colonne vertébrale de l’éléphant »
Sur les pattes arrières
Même si occasionnellement dans la nature, les éléphants se dressent sur les pattes arrières pour attraper des hautes branches, la répétition de cet exercice dans les cirques peut conduire à de sérieux problèmes de santé particulièrement douloureux pour l’animal : enflures des articulations, bursite et épanchement autour du coude…
S’asseoir
Faire asseoir un éléphant conduit à une pression excessive sur le diaphragme pouvant causer une hernie « en quel cas la paroi musculaire se rompt et les organes internes sont poussés à travers cette déchirure. C’est un état grave qui peut entraîner la mort si les organes concernés par le prolapsus (intestins, vessie, utérus) subissent un étranglement et se nécrosent».
Cette pression interne causée lors de ces exercices est bien connue des dompteurs dans le milieu du cirque, ceux-ci font commande couramment à leurs éléphants de déféquer avant d’entrer en piste pour éviter que cela n’arrive pendant le numéro»
En Inde, la position debout sur les pattes arrière ou sur un objet sphérique est interdite selon la législation sur la prévention de la cruauté envers les animaux. Or en France, ces numéros d’équilibre sont répandus dans tous les cirques utilisant des pachydermes.
Selon Kuntze qui a suivi de nombreux éléphants dans les cirques, le diagnostic de nombreuses affections est le résultat des comportements contre-nature imposés aux pachydermes, exigeant pression continue ou un sur-effort sur une partie du corps.
L’usure et le déchirement prématuré des jointures, tendons et jambes seraient la résultante des exercices impliquant la tenue sur une jambe ou la formation d’une pyramide. Lindau confirme que ces positions sur les pattes antérieures ou postérieures peuvent entraîner des boitements et être particulièrement dangereuses pour les jeunes éléphants. Nombre de ces animaux meurent prématurément des suites de complications aux niveaux des membres.
Extraits du rapport « Les éléphants dans les cirques », Franck Schrafstetter/OneVoice, 2004.