NACs ou le risque de zoonose

Qu’est-ce qu’une zoonose, ou une maladie zoonotique ?

La propagation de la Covid-19 a plongé l’Europe dans une crise où la restriction de nos libertés individuelles se justifie par l’impératif sanitaire. Confinement, couvre-feu, contrôle sanitaire, dépistage, quarantaine, et – disons le franchement -, paranoïa, caractérisent cette pandémie fulgurante et mondiale.

La Covid-19 est une zoonose, une maladie infectieuse de la même famille que le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) et certains types de rhumes courants. Or, les zoonoses sont des maladies transmissibles des animaux vertébrés à l’humain par contact direct ou indirect, à savoir par les aliments, l’eau ou l’environnement. Certaines peuvent engendrer des épidémies chroniques comme Ebola et la salmonellose, d’autres des pandémies mondiales comme celle de la COVID-19. Il existe en tout plus de 200 maladies zoonotiques découvertes à ce jour !

La détention d’animaux sauvages pour le divertissement humain représente donc un risque sanitaire important et souvent négligé dans le commerce des espèces sauvages ou dans l’élevage.

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Citons par exemple le rôle présumé des fermes à fourrure dans la prolifération et la mutation de la Covid-19 en Europe. Cette catastrophe sanitaire fut révélatrice des conséquences terribles de ces établissements pour les animaux, confinés par milliers les uns sur les autres dans des conditions écœurantes, mais aussi pour les humains infectés par le virus.

Citons encore les pratiques agricoles dans les élevages, où la résistance aux antibiotiques augmente le risque d’agents pathogènes zoonotiques, comme le rapporte l’association L214 dans son enquête au sein d’un l’élevage intensif de lapins en Bretagne ; en moins de 4 mois, 112 kg d’antibiotiques ont été livrés à l’élevage dont 3 sont classées par l’OMS en importance critique dans le cadre de la surveillance de l’antibiorésistance.

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La détention de NACs, une voie royale pour la prolifération de zoonoses.

La détention des nouveaux animaux de compagnie (NACs) ou animaux dits « exotiques » – dans le sens où ces individus proviennent de régions éloignées de celle du détenteur – devient de plus en plus populaire en France due la multiplication de NACs détenus chez le particulier (reptiles, amphibiens, petits rongeurs…) ou détenus dans des infrastructures publiques tels que les zoos, fermes pédagogiques, terrariums, etc.

Code Animal condamne la captivité des animaux sauvages d’une part pour des raisons éthiques : les animaux sont véritablement emprisonnés dans des cages, aquariums ou enclos qui ne permettent pas de répondre aux besoins de l’individu alors en situation de stress et de mal-être, et ce malgré les efforts dits d »’enrichissements ». Un animal hors de son espace n’est qu’une ombre !

Pour des raisons pragmatiques d’autre part : la conservation des animaux ex situ, à savoir dans un espace autre que leur habitat naturel, n’a pas vocation à renflouer significativement l’espèce, puisque le patrimoine génétique des animaux détenus et reproduits en captivité se modifie au fil des générations. L’espèce en captivité devient alors plus fragile, adopte des comportements parfois différents que ses congénères sauvages, rendant difficile, voir impossible toute possibilité de réintroduction fructueuse. Les animaux exotiques en captivités peuvent également devenir invasives lorsqu’elles sont libérées (si l’animal s’échappe ou en cas d’abandon) et représentent alors une menace importante pour les espèces de notre environnement local.

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Mais aussi pour des raisons sanitaires : la détention d’animaux exotiques comme les NACs engendre des risques de transmission de maladies particulièrement dangereuses pour les enfants en bas âges, comme le rapporte l’Académie Nationale de médecine dans une publication majeure de mars 2024. Les multiples scientifiques ayant contribué au rapport expliquent comment « les animaux de compagnies non traditionnels (ACNT) » (comprenez hors chiens et chats) sont des « réservoirs de bactéries » tels que la salmonelle transmis par les reptiles, rongeurs, amphibiens ou comme certains parasites. Ces risques sont valables à la fois chez un particulier et dans des infrastructures publiques comme les zoos (pudiquement nommés parcs animaliers), notamment lorsque les lieux de restauration y sont à proximité.

La détention d’un animal exotique en captivité pause également des risques sanitaires indirects, puisque nombres de ces animaux sont capturés dans leur habitat naturel puis transportés en différents points d’étape dans le monde pour arriver aux portes de l’Europe et finir leur jour chez un particulier. Les marchés humides et marchés d’animaux sauvages sont par exemple des espaces où les animaux vivants, domestiques ou sauvages, et de différentes origines sont abattus sur place puis vendus. Leur proximité, empilés dans des cages dans des endroits insalubres, augmente la propagation des agents pathogènes qui échangent une partie de leur code génétique et mutent afin d’être plus transmissibles entre les espèces. C’est par exemple le marché à Wuhan en Chine qui serait à l’origine de l’épidémie de la Covid-19.

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Quelles solutions ?

L’Académie Nationale de médecine recommande de sensibiliser le public sur certains risques que pose la détention d’animaux sauvage en captivité pour les enfants de moins de 5 ans (rongeurs, serpents, tortues, amphibiens, furet, rat, iguane), chez le particulier comme dans les établissements publics (zoos, écoles, fermes pédagogiques, parcs aquatiques, animaleries, zones de loisirs, etc). Ils déconseillent également les activités supposément éducatives où les humains et surtout les enfants sont en contact avec les animaux détenus, comme dans un « petting zoo » où les visiteurs peuvent nourrir et caresser les animaux.

Code Animal encourage la prise en compte de ces conclusions par le grand public et par l’administration, et recommande plus largement la fin de la captivité des animaux sauvages, qu’ils soient exotiques ou domestiques, au bénéfice de l’animal et de notre espèce !

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SOURCES :

Jean-Luc, A., Véronique, B., Gérard, B., Pierre, B., Hervé, B., Moncef, B., … & Serge, R. (2024). Avis. Risques zoonotiques et traumatiques liés aux contacts des enfants avec les animaux de compagnie non traditionnels (ACNT). Bulletin de l’Académie Nationale de Médecine.

https://www.who.int/fr/news-room/questions-and-answers/item/coronavirus-disease-covid-19

https://www.unicef.org/wca/fr/coronavirus-cest-quoi

Zoonoses (who.int)

https://www.l214.com/animaux/lapins/antibiotiques/

https://www.nationalgeographic.fr/environnement/2020/04/les-marches-humides-seraient-le-point-de-depart-du-coronavirus