La surexploitation des espèces sauvages nuit à l’Homme : peut-on vraiment s’étonner ?

Créée en 2012, la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) a publié un tout nouveau rapport sur la surexploitation des espèces sauvages, plantes et animaux confondus. Cet association intergouvernementale trouve sa source dans la Convention sur la Biodiversité de 1992 et acquiert définitivement le rôle d’intermédiaire entre les communautés scientifiques et les acteurs décisionnaires lors de la publication de son premier rapport en 2019.

Il y a 4 ans déjà, l’IPBES révélait la menace d’extinction que font courir les activités néfastes de l’homme pour plus d’un million d’espèces sauvages. D’ailleurs, nous entendons par « espèces sauvages » toute espèce non sélectionnée génétiquement sur plusieurs générations et qui peuvent survivre indépendamment de toute action humaine dans n’importe quel environnement, excluant donc les animaux errants ou réintroduits. Différents niveaux de domesticité ou de « caractère sauvage » sont évidemment admis, qui rappellent entre autres la catégorie des animaux « liminaires » pour qualifier les animaux pseudo-sauvages à proximité des sociétés humaines.

Quoi qu’il en soit, la base de données pour mettre au point cette évaluation mondiale de 2019 ne regroupait pas moins de 15000 informations scientifiques et gouvernementales, et prouvait la dégradation massive des écosystèmes dont l’Homme reste dépendant. L’exploitation de ces espèces sauvages génère en effet de nombreux emplois et revenus…

Quelle ironie de constater qu’une espèce se considérant supérieure aux autres puisse en même temps se condamner de la sorte !

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Après une première publication en 2019, un nouveau rapport peu surprenant.

Validé par les 139 pays membres de l’IPBES, le nouveau rapport servira de base scientifique primordiale pour les futures discussions de la COP15 se déroulant à Montréal en décembre prochain. Et pour cause : cette publication souligne une surexploitation complète et globale des espèces sauvages par l’Homme, touchant aussi bien les poissons à hauteur de 34%, que des arbres à hauteur de 12% et des milliers de mammifères sauvages. Par conséquent, l’alerte porte sur la quantité d’espèces sauvages exploitées abusivement par l’Homme mais dont il est dépendant, dans des domaines aussi variés que l’agriculture, la médecine voire les sciences et l’alimentation de façon globale.

Les populations pauvres seraient particulièrement touchées par les conséquences de cette surexploitation,  comme celle du bois sauvage amené à se réduire si rien n’est fait pour le conserver.

Le rapport des peuples autochtones à la nature : un exemple signifiant selon le rapport.

La relation qu’entretiennent les populations autochtones avec la biodiversité qui les entoure est pris à titre d’exemple à de nombreuses reprises dans ce rapport. L’exploitation des espèces sauvages est en effet centrale dans la construction des identités, des constructions sociales et expressions culturelles propres aux communautés locales. Au-delà du poids que représentent les autres animaux dans leur héritage culturel, leur utilisation reste le seul moyen pour ces populations indigènes de survivre et de se développer.

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La plupart des sociétés autochtones usent alors d’un rapport de réciprocité entre les écosystèmes et leur exploitation, à savoir une obligation de respect pour la nature en empêchant le gaspillage et en assurant la redistribution équitable de cette exploitation entre les hommes et les autres espèces. Ces interactions passent notamment par un usage de la biodiversité qui permette sa régénération, tout simplement !

Pourquoi ce rapport est -il si important ?

Comme le souligne la chercheuse Sophie Gryseels, affirmer de façon scientifique et quantitative les risques de la surexploitation de la faune et flore sauvage pour l’humain est fastidieux. Il faut en effet parvenir à comparer les effets bénéfiques de l’utilisation de certaines espèces pour des groupes humains en particulier, avec le préjudice global qu’il en ressortira à plus long terme.

Les inquiétudes des chercheurs portent notamment sur la sécurité alimentaire en grande partie dépendante de la flore sauvage comme les arbres et les plantes. Environ 1/3 de la population mondiale, soit 2,4 milliards d’individus, dépend du bois comme mode d’énergie pour cuisiner et s’alimenter correctement !

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Peut-on faire un lien entre surexploitation et trafic d’espèces sauvages ?

Nous n’avons de cesse de le rappeler, le trafic d’espèces sauvages pour leur exploitation est le troisième plus conséquent des commerces après celui des êtres humains et des drogues. Légal comme illégal, il pèserait à lui seul entre 69 et 199 milliards de dollars par an, constituant de façon indéniable un acteur majeur des menaces qui pèsent sur la biodiversité.

Pour le chercheur français Jean-Marc Fromentin, de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer, des solutions applicables dès maintenant existent, au nombre desquelles figure la règle de la réciprocité des relations entre les écosystèmes et le bénéfice qu’en retire l’homme – s’assurer d’une situation de « donnant-donnant » en quelques sorte -, le maintien et la création de nouvelles zones protégées sur terre et en mer, entre autres.

Mais que devrait-on faire exactement ?

Comme tout bon rapport, celui publié par l’IPBES conclut sur des conseils et solutions que doivent impérativement adopter les Etats pour éviter que nos activités sur les espèces sauvages ne mènent à une insécurité alimentaire croissante et des pénuries à répétition. Le rapport conclut ainsi sur la nécessité de :

  • Réduire plus strictement la pêche illégale au profit des circuits cours de « petite pêche »
  • Rendre plus strict les certifications pour l’exploitation forestière
  • Stopper impérativement les subventions qui nuisent à la biodiversité
  • Initier concrètement des politiques de redistributions plus équitables entre les bénéfices et les coûts que provoque l’exploitation des espèces sauvages.
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Notre philosophie au sein de Code Animal

Code Animal espère que les recommandations alarmantes de ce dernier rapport pousseront les acteurs décisionnaires du monde entier, et particulièrement des pays riches, à agir. Nous rappelons toutefois que les conséquences néfastes pour l’homme provoquée par ses abus envers les autres espèces ne devraient être qu’une raison de plus, et non l’unique raison, pour transformer ses relations avec la biodiversité.

Parce que les autres animaux ainsi que leur habitat comptent pour eux-mêmes et eux seuls, nous devons dans tous les cas interagir avec eux dans le respect et la mesure. Ce respect exclu évidemment l’enfer de la captivité pour un individu sauvage et l’arrêt de son objéification, de le considérer comme une chose bonne à être commercée.

Somme toute, une société humaine durable est une société qui prend en compte l’intérêt des autres espèces, dans le cadre de relations réciproques et équitables !

Marion

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Sources :

Rapport de l’IPBES : Summary for Policymakers – IPBES Sustainable Use of Wild Species Assessment (1).pdf

Qu’est-ce que la plateforme sur la biodiversité (IPBES) ?| vie-publique.fr

IPBES Home page | IPBES secretariat

https://www.geo.fr/environnement/la-surexploitation-des-especes-sauvages-menace-des-milliards-dhumains-avertit-lonu-210817

https://www.rtbf.be/article/selon-l-onu-la-surexploitation-des-especes-sauvages-menace-des-milliards-d-humains-11027601