Alors que le Japon s’achemine vers une catastrophe nucléaire majeure, qui aura des conséquences pour le monde entier, penchons-nous un instant sur le devenir des animaux de la région de Tchernobyl après que l’humain ait fui le désastre nucléaire qu’il avait engendré.
Dans les mois et années qui suivirent la catastrophe, plus de 400 naissances anormales chez les animaux domestiques furent observées autour de la zone. Mais du fait des retombées en « tâches», des zones quasiment indemnes en côtoyaient d’autres totalement vidées de leur faune. Depuis vingt-cinq ans les scientifiques observent les effets des radiations sur la flore et la faune de Tchernobyl. A voir l’excellent documentaire d’Arte, Tchernobyl : une histoire naturelle. Certaines espèces se sont donc étonnamment bien adaptées aux radiations contrairement à d’autres, en voici quelques exemples :
– Les bouleaux ont résisté et n’ont montré aucune mutation, alors que les pins sont morts ou ont muté. Cela serait dû aux différences de tailles des génomes : plus petits chez les bouleaux, ils ont moins de chance d’être heurtés par les radiations.
– Les rongeurs sont en pleine forme sur la zone où ils pullulent. Des milliers de souris, ont été capturés sur lesquelles aucunes modifications ou nécroses n’ont été observées. Leur rapidité de reproduction, et donc de renouvellement des générations, pourrait expliquer que leur patrimoine génétique n’ait pas le temps de subir les effets radioactifs.
– À l’automne 1998, 21 chevaux de Przewalski, race indompté par l’homme, ont été relâchés dans la « zone interdite ». Ces animaux en surnombre, généralement âgés ou en mauvaise santé, venaient de la réserve Ascania-Nova, au sud de l’Ukraine Bien que le pronostic sur leur survie ait été à l’origine assez négatif, les chevaux se sont bien adaptés à leur environnement, et ce sont maintenant une cinquantaine de chevaux, recensés en 2009, qui vivent en totale liberté dans la zone. La résistance de ces chevaux aux radiations s’expliquerait par la rusticité de leur patrimoine génétique qui diffère de celui du cheval domestique : 66 chromosomes au lieu de 64.
– Par contre les scientifiques ont observé sur les hirondelles des tumeurs au niveau des ailes, des yeux, des pattes, des dépigmentations (albinisme), des variations anormales des tailles des œufs, sperme stérile. Le fait que l’hirondelle soit une espèce migratrice, juste de passage sur le lieu, pourrait expliquer ces mutations et ces maladies.
Vingt-cinq ans après la catastrophe, environ 3% de la radioactivité initiale subsistent dans la zone interdite de Tchernobyl. Paradoxalement, le départ de l’homme a eu des incidences très positives. En effet, lorsque l’homme habitait à Tchernobyl, la pollution chimique de l’environnement était forte, son empreinte écologique terrible. Maintenant, les animaux et les plantes, toutes ces terres et grands espaces ont recommencé à se développer indépendamment de l’homme, d’après leurs propres lois naturelles, prouvant bien que la faune et la flore n’ont nul besoin de l’homme pour se réguler.
En fin de compte, ces lieux sont devenus plus riches, avec une plus grande diversité qu’à l’époque où l’homme y était installé. Maintenant des ours, des loups, des castors, des cygnes à bec jaune sont réapparus dans la zone interdite. Ces dernières années la zone de Tchernobyl est devenue une véritable nurserie d’animaux sauvages pour toutes les régions aux alentours. Ainsi s’est recréé dans cette zone un complexe écologique tout à fait équivalent à celui qui existait il y a des centaines d’années.
M.-C. Détienne